• La fée électricité devenue sorcière, par Pierre Lance

    pantin_electriquePeut-on imaginer notre vie sans électricité ? Songeons à une coupure totale de courant survenant vers 21 heures dans une grande ville au mois de janvier. Obscurité totale ! Tous les appareils électriques s'arrêtent. Plus de télévision, plus de radio, plus d'ordinateur, plus de cuisinière, plus de radiateur, plus de réfrigérateur, plus de congélateur...
    Bon, pas de panique, le courant va revenir d'un instant à l'autre. Prenons patience. Avons-nous des bougies ? Ah oui ! Dans un placard de la cuisine. J'y vais à tâtons. Bing ! Je me suis cogné dans la porte. Zut ! J'ai cassé un bol. Voilà les bougies. Où sont donc les allumettes ? Ah ! les voici. Crac ! Oh quelle jolie lumière ! Qu'est-ce qu'on fait ? On joue aux cartes ? Pas la peine de s'y mettre, le courant va sûrement revenir d'un instant à l'autre.
    Oui, mais s'il ne revient pas ? Si la panne dure des heures, des jours, des semaines, parce qu'il a fallu arrêter une centrale nucléaire où l'on avait décelé un risque d'accident ? (Le 14 août 2003, 50 millions d'Américains sont restés sans électricité pendant deux jours). Alors, c'est toute la vie de la cité qui est bouleversée. Plus rien ne fonctionne, plus rien ne s'éclaire. Les machines sont inertes, les usines se ferment, les magasins sont aussi sombres que des tombeaux...
    Les hommes connaissent l'électricité depuis la plus haute Antiquité. Le mot vient du grec elektron, qui était le nom de l'ambre jaune, une résine fossile ayant des propriétés électrostatiques. La laine est également électrostatique. On connaît de longue date des poissons électriques, représentés sur des bas-reliefs égyptiens. Et le poisson-torpille, dont les décharges électriques sont utilisées contre la migraine ou la goutte par les Romains au 1er siècle de notre ère.
    C'est William Gilbert, médecin de la Reine d'Angleterre (XVIe siècle) qui donne le nom d'électricité à cette étrange forme d'énergie. C'est en 1752 que Benjamin Franklin démontre que la foudre est un phénomène électrique et il invente le paratonnerre. Mais c'est au XIXe siècle qu'apparaissent les grands scientifiques dont les noms seront désormais inséparables de l'électricité, tels Ampère, Faraday ou Volta. En 1799, Alessandro Volta invente la pile électrique. En 1882, Edison crée les premières usines de production d'électricité en courant continu. Lucien Gaulard invente le transformateur et Nikola Tesla les machines à courant alternatif. Ce dernier procédé va s'imposer grâce à la collaboration de Tesla avec l'industriel George Westinghouse, qui obtient le contrat d'installation de toute l'infrastructure électrique des Etats-Unis. Et c'est bientôt l'engouement du monde entier pour la «fée électricité». Nikola Tesla, véritable génie de l'électricité, multipliera les inventions dont beaucoup seront occultées.
    La production des barrages hydroélectriques construits sur les fleuves et des centrales thermiques fonctionnant au charbon sera bientôt insuffisante à satisfaire la boulimie d'électricité des sociétés modernes, parsemées d'appareils électriques de toutes sortes utilisant cette énergie si pratique, si magique et apparemment non polluante. On va se tourner alors vers la construction des centrales nucléaires et la première est inaugurée à Calder Hall (Angleterre) en 1955.
    Puis les Etats-Unis et surtout la France développeront sur une grande échelle la «nucléarisation» de l'électricité, étouffant dans l'oeuf la production des énergies renouvelables, malgré les réussites de l'usine marémotrice de la Rance (en Bretagne) et de la centrale solaire d'Odeillo (près de Font-Romeu, Pyrénées Orientales). Quant au génial projet de centrale aérothermique à pollution nulle du regretté Edgar Nazare, il sera complètement méprisé par l'EDF. Nous sommes donc aujourd'hui, dans nos appartements comme sur nos lieux de travail, totalement encerclés par des appareils électriques de toutes puissances, depuis la simple lampe d'éclairage jusqu'au mixer de cuisine en passant par l'aspirateur ou la console de jeux, branchés sur des fils conducteurs qui parcourent invisiblement les murs da ns lesquels ils sont encastrés.

    Qui ne croit que ce qu'il voit ignore l'essentiel de l'univers...

    On ne voit rien, on ne sent rien, on appuie sur un bouton magique et hop! la lumière jaillit et la force est avec nous ! Merveilleux, non ? Durant des décennies, personne ne s'est inquiété de savoir si cette omniprésence de l'électricité avait des conséquences quelconques sur notre santé.
    Or, elle en a, et de très inquiétantes.
    On sait depuis 1979, par exemple, que les leucémies infantiles concernent deux fois plus que la moyenne les enfants habitant à proximité d'un transformateur ou d'une ligne à haute tension (enquête de l'épidémiologiste américaine Nancy Wertheimer).
    On a également constaté un nombre anormalement élevé de fausses couches chez les femmes utilisant des couvertures chauffantes. La découverte empirique de la pollution électromagnétique est due au médecin niçois Jean-Pierre Maschi, dans le courant des années 60. Étant lui-même «électrosensible», il étudia les réactions de son organisme et put mettre au point un protocole de protection contre les rayonnements des appareils électriques, qu'il soupçonna très tôt d'être la principale origine de l'une des plus invalidantes «maladies de civilisation», la sclérose en plaques. Bien après Maschi, des chercheurs canadiens parvinrent à mettre le phénomène en évidence et, peu à peu, la réalité de cette pollution, indécelable de prime abord, fait son chemin.
    Jean-Pierre Lentin, sous le titre Ces ondes qui tuent, ces ondes qui soignent (Albin Michel) a consacré un livre à l’étude des influences électriques sur notre organisme et Annie Lobé a complété ce travail dans La fée électricité : fée ou sorcière ? (Santé Publique éditions). Annie Lobé est une journaliste d'investigation de grand talent, qui enquête depuis 2001 sur les champs électromagnétiques et dont les articles très appréciés ont été publiés dans de nombreux journaux, dont notamment Sciences et Avenir, Le Généraliste, Tribune Santé, Nexus... Elle enquête de façon méthodique et pointilleuse, contrôlant elle-même sur le terrain, avec des appareils très performants, la réalité et la force des rayonnements et fournit dans son livre toutes les références utiles. Les résultats de son enquête font froid dans le dos, car ils établissent que nous sommes tous immergés dans un océan électromagnétique aux effets inexorablement perturbateurs du fonctionnement de nos cellules, et que cette pollution ne cesse de monter en puissance, du fait de la multiplication des appareils que nous plaçons inconsidérément dans notre environnement immédiat.

    Un déluge nouvelle manière

    Des millions de gens achètent chaque jour de nouveaux appareils électriques, que ce soit pour travailler, bricoler, s'amuser ou s'instruire. Aux effets de toutes ces machines s'ajoutent évidemment ceux des transformateurs locaux, des fils électriques, prises multiples, rallonges, etc., qui, tous, sont autant d'émetteurs plus ou moins dangereux dont rien ne nous protège. Et voici que s'y ajoutent encore depuis quelques années les téléphones portables et leurs antennes-relais. C'est le déluge électromagnétique !
    Et Annie Lobé nous explique : «Le réseau électrique utilise un courant alternatif à la fréquence de 50 hertz. Cela signifie que les électrons se déplacent dans les fils de cuivre non plus en ligne droite, mais en changeant de direction cinquante fois par seconde.» Puis elle cite un ouvrage collectif publié sous la direction de Louis Leprince-Ringuet : «Une charge électrique en mouvement produit dans l'espace qui l'entoure un champ capable d'action sur une autre charge en mouvement. (...) Plus précisément, une charge électrique immobile produit un champ électrique. Si elle se meut, elle produit aussi un champ magnétique (sans pour cela cesser de produire un champ électrique.)» D'où il résulte que «ce champ électrique est présent dans tout appareil électrique dès lor s qu'il est branché sur le secteur, même s'il n'est pas en fonctionnement.»
    En outre, très peu d'obstacles matériels peuvent arrêter le rayonnement de ces champs. Selon Claude Bossard, électricien spécialisé en «biocompatible» ou «biotique» : «Le champ électrique se diffuse dans tous les matériaux de construction : de façon importante dans le métal, le bois et ses dérivés, les cloisons légères en placoplâtre; de façon moindre, mais à condition qu'ils soient reliés au sol, dans la brique, la pierre, le béton, la terre.» N'allez pas croire en effet que le bois vous isole, car il recèle toujours une certaine dose d'humidité. Il n'est isolant que du courant électrique direct en mouvement, mais non pas des champs électromagnétiques. Annie Lobé nous précise : «Sur le plan biologique, l'attraction exercée pa r ce champ magnétique de fréquence extrêmement basse est assez puissante pour modifier les transferts ioniques qui s'effectuent à travers les membranes des cellules vivantes. Lorsqu'un organisme vivant est placé dans le champ d'attraction magnétique créé par la circulation du courant électrique dans un appareil, le phénomène d'aimantation se produit sur les ions libres qui, par leurs mouvements de va-et-vient, accomplissent les fonctions vitales.»
    Il ne faut pas oublier en effet que chacune de nos cellules (tout particulièrement nos cellules nerveuses et nos neurones) est un infinitésimal transformateur électrique, dont le fonctionnement harmonieux conditionne notre santé. Or, il peut être perturbé par les puissants champs électromagnétiques dont l'homme a parsemé son environnement. Les seuls ''isolants'' naturels contre les champs magnétiques sont l'air et la terre, c'est -à-dire l'éloignement par rapport à la source d'émission.
    Il découle de ce constat que la principale précaution à prendre est de vous tenir toujours aussi éloigné que possible des appareils, qu'ils soient en fonctionnement ou non, ainsi que des prises multiples ou simples, des fils et des rallonges. Et il vous faut notamment protéger votre sommeil, durant lequel vos cellules se régénèrent. (Chacun de nous est constitué de mille milliards de cellules par kilogramme de poids , soit 80.000 milliards de cellules pour un homme de 80 kg.)
    Pour protéger votre sommeil, il faut bannir de votre chambre et de celles de vous enfants tous les appareils électriques et surtout les téléviseurs et les ordinateurs. Si vous ne pouvez vous passer d'une lampe de chevet et d'un radio-réveil, faites en sorte qu'ils ne soient pas trop proches de votre tête (un mètre de distance est préférable). Si une ligne électrique longe la tête de votre lit, ce qui est généralement le cas, écartez votre lit du mur autant que vous pourrez (10, 15, 20 cm).
    Et n'oubliez pas que les champs traversent les murs. Si de l'autre côté de la tête de votre lit, dans la pièce voisine, un ordinateur ou un poste de télé, même éteint, est adossé au mur, bonjour les dégâts. Ici se pose le problème des voisins. Si vous avez de bonnes relations avec eux, étudiez ensemble la disposition des appareils dans vos logements respectifs, dans l'intérêt des deux parties. Il faut en outre se passer des appareils électriques les moins nécessaires. Il existe tout de même deux isolants assez efficaces : le Plexiglass et le plastique dur. Installez sous vos appareils électriques (ordinateurs, télévisions, lecteurs de DVD, etc.) des sets de table en plastique qui freineront la propagation des champs électromagnétiques dans les meubles supports, que vous êtes amenés à toucher sans cesse.
    Portez en appartement des pantoufles avec semelles de plastique, car elles vous isoleront du sol, et ainsi des lignes électriques circulant dans le plafond du voisin du dessous. Vous pouvez aussi recouvrir de petites bassines en plastique dur les blocs de prises multiples, surtout si elles comportent un mini-transformateur (pour téléphone par exemple), qui chauffe en permanence. Et enfin passez-vous fréquemment les mains sous l'eau du robinet, ce qui décharge l'électricité statique que vous avez accumulée à votre insu.

    Pierre LANCE

    (Pierre Lance est l’auteur de «Savants maudits, chercheurs exclus» - 4 volumes parus chez Guy Trédaniel Editeur)

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